A nu

J'ai honte.

Je vous le dis (à personne, certes), j'ai honte.
Sentiment dégoûtant qui n'est que le signe infaillible de mon égocentricité.

Mais je vous le demande : soyez indulgents.
Ces mots crachés (ou bien non, au contraire : jalousement gardés) ici n'ont rien de glorieux. Je le sais.
Mais ne souriez pas.

Considérez une petite boule qui gesticule vaguement, avec peut-être des yeux, deux billes sombres, cachés tout au creux d'elle-même. Si vous tendez l'oreille, vous n'entendrez pas un soupir. Un mince gémissement peut-être, continu ; mais il faudra être très attentifs. D'habitude, personne ne le perçoit. Et c'est peut-être mieux ainsi.
Il s'agit simplement de pincer doucement deux cordes tendues sur un bout de bois (les autres, sans doute, ont été violemment arrachées à la suite d'on ne sait trop quelle moquerie.) Il en sort un murmure à peine perceptible, un pétale de tulipe blanc (ou bleu, cela est presque pareil), mais comme retenu par de mornes parois, du carton, entre lesquelles il se cache. Et cette boîte est comme les entrailles de la petite chose qui gesticule vaguement.
Comprenez : le murmure ne vient pas d'elle, il est elle.

Et puis, tout va très vite. Un poignard très tranchant qui entaille d'un geste vif la petite chose, et qui l'éventre. Les deux billes sombres et ce qu'elles (re)gardent en secret au milieu d'elle-même sont mises à nu, offertes à tous les regards. Angoisse, vulnérabilité soudaine. Après quelques coups, il ne reste déjà plus que deux cordes.

Ne me demandez pas d'où vient ce poignard. N'accusez pas : un choix personnel, après tout. Car on ne peut se contenter d'une coquille fermée à double tour, quand bien même elle ne contiendrait, au lieu de perles, que le jus nauséabon que j'ai à vous offrir. (Oh, le vain balbutiement de justification !...)

Mais peu importe pourquoi. Ceci n'est ni beau, ni rien. Ce n'est que mon talon d'Achille.